Emotions, de Damas à Lyon

« Je suis Cendrillon de Damas » raconte une histoire forte en seulement un peu plus de deux minutes. C’était le défi à relever pour le désormais assez connu Nikon Film Festival qui donne l’opportunité aux réalisateurs de tester leurs histoires sur un format très court.

 L’histoire d’une fugitive…

 

Selma, interprétée par Léa Bac, est une jeune femme syrienne, emprisonnée par Daesh. Et en quelques secondes, l’immersion, les ambiances nous plongent dans un monde que nous préférerions ne pas connaître. Les chiffres, les reportages, les atrocités qui nous hantent prennent vie différemment grâce au pouvoir de la fiction. Fiction, sans affliction : pas d’apitoiement, mais l’occasion de rendre grâce à des personnages ancrés dans une réalité qui résonne dans l’actualité. Deux petites minutes qui en disent beaucoup plus que certains longs reportages.

Le film emmène loin de ce qu’on imagine, et peut d’ailleurs être complété par le visionnage d’un autre film du Nikon Film Festival, édition 2016 : Salah Issad avait réalisé « Je suis l’inespéré » où l’on retrouvait la courageuse Selma quelque part à Lyon. Les effets de style étaient plus présents pour traduire l’impact émotionnel intense de retrouvailles… Personnellement, j’en avais eu des frissons. (même si il paraît que tout le monde n’est pas capable d’avoir des frissons au même moment, j’ai lu ça dans une étude pseudo-scientifique)

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Selma et son ravisseur membre de Daesh  deux personnages joués par Léa Bac et Najib Guerfi dans le film de Salah Issaad.  Photo : Mars Yahl.

Ici il est question de s’échapper, de confiance, et aussi de hasard. L’inespéré est de nouveau présent, il semble que l’art de raconter les histoires se déroule comme un fil de plus en plus complet au fur et à mesure des films du réalisateur. D’ailleurs, fuir et s’échapper d’une réalité insupportable est un thème qui dépasse largement les frontières.

… Loin du conte de fées.

Car  Salah Issaad propose de donner corps et vie à des faits qui nous sont relayés par les médias. Ce n’est pas la première fois qu’il s’empare du sujet, du terrorisme , pour raconter une histoire, vécue de l’intérieur par ses protagonistes puisque ce thème, il l’avait exploré avec son court métrage « Dans le désert ». Ce dernier retraçait la fuite de deux ingénieurs algériens suite à la prise d’otage sur le site pétrolier d’In Amenas.

Il est encore une fois question de fuite, et des aléas de l’âme humaine, cette fois pour raconter l’histoire d’une jeune femme syrienne. Le thème de l’esclavage sexuel, de l’emprise, sont représentés avec pudeur. La noirceur, la violence est représentée dans les ombres, avec une lumière ténue et un sens de l’esthétisme. Sans toutefois dépasser les règles du réalisme, il propose au spectateur, d’imaginer un instant si sa vie était ailleurs…  Par ailleurs, c’est l’humanité de personnages qui ressort dans ce film, qui évoque l’ambiance créée par Merzak Allouache dans « Le Repenti »  film coup de poing, et coup de projecteur sur les conséquences de la décennie noire du terrorisme en Algérie.

Et dans un festival comme le Nikon Film Festival,  avec ce soin apporté à la mise en scène, ce court métrage représente une approche nécessaire pour dépasser les images préfabriquées, tout en proposant de toucher le spectateur.

Avec le filtre de la fiction, et  la puissance des émotions.

 

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